Soulagement et fierté aux balises roses
BIVOUAC MARATHON - OUARZAZATE
ÉTAPE 6
La veille : le rideau tombe sur 360° d’immensité, de solitude, et de silence. Enfin presque. Au fur et à mesure que la pénombre gagne du terrain, des tâches de lumières vertes, rouges et jaunes éclosent à l’horizon.
Tchin Tchin à la témérité
Les Cap’Fées n’ont pas lésiné sur les moyens pour profiter les pieds dans le sable d’un moment plus intime entre équipages soudés. Table de luxe, ambiance bougie, tartines gourmandes, c’est le camping 4 étoiles pour les teams 116 (Aurélie OLLIVIER / Giuseppa GABIOUD - PRODELEC' CH), 110 (Véronique BARBIER / Delphine VERRIEZ - Groupe Barbier automobiles) et 309 (Charlotte ALEIXANDRE / Annick BODIN - INTERMARCHE), qui trinquent aux anecdotes du jour. « J’ai ramené ma table de jardin qui pèse une tonne dans la voiture, mais il faut bien ça », sourit Aurélie de l’équipage 116, avant de poursuivre « Vous voulez la dernière ? Nous avons été dans la boue jusqu’aux genoux aujourd’hui, nous n’arrivions plus à nous en extraire mais heureusement des Cap’Fées sont passées par là ! ». Ce soir, elle est heureuse d’avoir vécue toute cette adrénaline après un passage en chambre stérile où elle rêvait du désert. Tchin-tchin à la solidarité, à l’amitié et à la témérité. Quelques tentes et éclats de voix plus tard, les équipages 185 (Pascale AVRILLA / Cécile THIBAULT), 211 (Marie-Christine GERLACH / Alexia HARANT - Maison Ronald Macdonald), 223 (Emilie DEJEAN / ANAIS STOUVENOT BOURDELLE - Entreprise Effy), 132 (Nathalie URIEL / Sylvie HOLDER - DEL'ENERGIES) et 350 (Laurence BULLOT / Amelie BESANÇON - MASFIP (27 Evreux)) sont d’humeur loquace et joyeuse. Ni une ni deux, les aventurières forment une pyramide pour une photo souvenir.
Un brin de nostalgie au petit matin
Après une nuit venteuse dans l’antre du « Cirque magique », les Cap’Fées se réveillent avec les premières lueurs du soleil qui parent le bivouac d’une lumière rose. Ce matin, un sentiment de nostalgie accompagne les gorgées de café. Ultime exercice de pliage de tentes dans le désert, ultime briefing, ultime vent de folie sur les pistes. Les esprits encore légèrement embrumés de la veille, les filles écoutent les dernières recommandations. Elles n’ont plus que quelques heures devant elles pour s’élancer allègrement sur les pistes, vibrant autant que leur compagnon de route et se prouvant qu’elles sont des femmes exceptionnelles qui en ont sous le capot.
Dernier coup de sifflet
Sur la ligne de départ, mille émotions se lient sur les visages : l’euphorie, la tristesse, le soulagement… Les véhicules ronronnent, prêts à démarrer en trombe et à laisser derrière eux le souvenir d’un passage audacieux. « On y va, on donne tout ! » entend-on résonner à travers le doux bruit des moteurs. « C’est passé trop vite, on se prend des claques et on comprendra ce qu’on a vécu une fois chez nous. L’ambiance du pays et la vie en collectivité vont me manquer. Il y a tout ce que je recherche ici », explique Suzie de l’équipage 113 (Mélissa CANCIAN / Suzy BOISSONOT - SOUDA ELEC). De son côté le duo 370 (Sandra BERTRAND / Alexandra EBERT) est ému. « On a vécu des choses très fortes, l’étape d’hier fût d’ailleurs très riche en émotions, on a versé des larmes, certaines paroles ont fusé, mais en général, notre habitacle respirait la sérénité et nous sommes tristes que ce soit déjà la fin », explique Sandra.
Cette toute dernière étape de 92km est comme une cerise sur le gâteau pour celles qui aiment laisser des traces derrière-elles et pour celles aussi qui ont envie de grappiller quelques points au classement. La piste offre un toboggan de sable, un lac asséché sur lequel les roues filent à toute vitesse et des vallées légèrement rocailleuses annonçant les dernières secousses.
Ça y est, on l’a fait !
Au loin, tel un mirage, le premier véhicule s’apprête à franchir l’allée d’honneur. Les balises roses qui flottent au vent, tel un trophée, signifient trois mots : dépassement de soi.
D’une sérénité remarquable, le duo 218 (Clotilde FAVRE / Margaux ESTOUR - WARM UP) est le premier à crier victoire. « On est heureuses d’être les premières aujourd’hui. C’était une expérience complètement folle. Chaque jour réservait des surprises et c’était génial ». La deuxième team 117 (Blandine VINCENDEAU / Béatrice MUGNIER - biesse) à franchir la ligne d’arrivée aimerait étirer le temps pour que l’expérience ne s’arrête pas. « On s’est fait plaisir et on est tristes que ce soit la fin », lance Béatrice. Les équipages défilent petit à petit, et c’est une explosion de joie qui enveloppe la piste désertique. Grande émotion du côté des Cap’Fées 223 (Emilie DEJEAN / ANAIS STOUVENOT BOURDELLE - Entreprise Effy) qui s’enlacent fort. Des larmes coulent sur le visage d’Émilie, qui trop émue, ne trouve pas les mots. « Ce raid est particulier pour ma co-équipière et amie, car nous avons couru pour sa fille de six ans atteinte de diabète 1. On est fières de l’avoir fait pour défendre cette cause et pour montrer ainsi que c’est faisable. On s’améliore de jour en jour et on aimerait continuer jusqu’à ce que ce soit parfait », explique alors Anaïs. Quelques mètres plus loin, les filles de la team 174 (Sophia SERVAIN / Laura BOUCHER - Irish Lane), pleurent de joie ensemble « Tout allait très bien, ce matin, et là, les larmes coulent. C’est trop d’émotions d’un coup ».
De son côté, les benjamines de l’équipage 200 (Julie GENEVOIS / Mathilde GRAS - VILLAVERDE MONTCEAU) et amies depuis 20 ans, sont heureuses d’avoir partagé les montagnes russes ensemble. « Mathilde a géré comme une reine. On est fières car on est parties de loin, sans préparation au préalable. On souhaiterait remettre ça mais d’ici 5 ans, histoire de digérer tout ce que nous avons vécu », sourit Julie. De son côté, Anita de la 150 (Anita MARTINEZ / Dominique LASCOMBE CHIROL - ETUDE GÉNÉALOGIQUE CARLASSARE - CHAMBÉRY), se remémore son Cap Fémina 2017, et passe la balise d’arrivée avec fierté. « Cette année, c’était beaucoup plus difficile, donc pour moi, ce raid c’est le summum du dépassement de soi. Je suis soulagée d’être arrivée au bout. C’est extraordinaire d’être là, tankages après tankages, galères après galères ».
Alors prêtes à repartir ? Cela ne fait aucun doute pour l’équipage 24 (Christelle REYMONET / Véronique VIDAL) en SSV qui, d’ailleurs, ne lâcherait pour rien au monde son compagnon de route. « On devait le faire en 4X4 puis au final on a bien fait de changer d’avis. Le SSV, ce sont des émotions garanties ! Ça tombe bien, ma co-équipière et moi sommes un peu casse-cou », explique Christelle. La team 31 (Emeline MARTY / Noémie HUMEZ - OBRA Ingienierie), enchérit « On se prend vite au jeu de la gagne surtout que là, il n’y avait que 8 équipages en SSV ».
« Je ne sais pas si c’est du soulagement, du bonheur, de la fierté, c’est très confus, mais ce qui est certain c’est que je repars dès que possible ! », conclut Rachel de l’équipage 133 (Rachel LACOTE / Francoise WILLIAM - Carrosserie D'K BOSS à Saint Medard en Jalles (33)).
Les Cap’Fées ont tenu la route, franchi les caps, déjoué les obstacles, et surtout elles ont prouvé que l’aventure se vit aussi au féminin, avec en prime la solidarité.